mercredi, juin 20, 2007

Pour un monde meilleur ? (29)

Il comprend à ce moment qu’il est peut-être amoureux…

M.G

lundi, juin 18, 2007

Pour un monde meilleur ? (28)


Yohan était malheureusement pour elle dévoué à des tâches autrement plus pragmatiques et précises. Sans doute une des raisons pour lesquelles il ne l’avait pas recontactée était qu’en plus de son emploi du temps très serré et de la nécessité de discrétion entourant l’acte qu’il préparait, il ne voulait pas l’impliquer malgré elle à ce qui représentait quoiqu’on en dise, il en avait plus que conscience un meurtre.
Il pense à sa mère.
Chaque jour, chaque instant il pense à elle. C’est interdit pourtant. Mais s’il ne pense pas à elle, il sait que l’autre femme viendra le distraire, et cela est impossible. Alors il pense à sa mère et tente de se convaincre qu’elle approuverait d’une certaine manière.
Cela fait des années maintenant qu’il a compris qu’ôter la vie était malheureusement parfois une nécessité, une obligation même. Mais au moment de le faire, il semble qu’une choses épouvantable fasse son apparition.
Soudain, cette chose qui grossit dans son ventre, ce malaise chaque jour plus important, envie de gerber continuellement, à n’en plus pouvoir boire et fumer, cette chose qui semble vouloir se nommer conscience tente de le détourner de ce qui pourtant s’impose de plus en plus à lui comme un impératif incontournable.
Il faut détruire le mal à sa source sans plus jamais chercher à l’expliquer, à lui trouver des raisons, il faut l’éliminer. L’éliminer cela signifie faire des dommages collatéraux, cela signifie ôter la vie à ceux qui veulent vous détruire, même si parfois on perd pied, on ne sait plus vraiment si on a raison ou tort, si un relativisme absolument rongeur s’empare de vous…

Je vais avoir trente cinq ans.
Je n’ai presque rien construit. Publié trois livres, donné des cours de ci de là… rencontré une femme, il y a dix ans…
Tous mes amis sont partis, enfin ceux à qui il restait un peu d’intelligence. Moi je suis resté, par une lâcheté imbécile déguisée en bravoure, en combat. J’ai décidé de croire en mon pays ou au moins de l’aimer. J’ai décidé de me donner une chance sans doute. Ou peut-être ne voulais-je simplement pas m’éloigner d’Elodie…

Sa mère lui a toujours raconté que son grand-père disait qu’Hiroshima avait permis d’éviter la mort de millions de personnes. Comment choisit-on ceux que l’on va éliminer afin de sauver les autres, ceux qui suivent… ?

Là n’est vraisemblablement pas la question. Quelque part ceux qu’il s’apprête à détruire méritent de mourir. Mais, enfin, n’a-t-il pas toujours été contre la peine de mort ?
Comment est-il possible qu’à présent il se prépare à tuer.
Pourquoi se sent-il soudain si seul ? Lui qui n’a jamais pensé à ce genre de choses auparavant… soudain la vie semble achopper…

Tuer et puis ensuite plus rien…


M.G

jeudi, juin 14, 2007

Pour un monde meilleur ? (27)



La Cellule signait la fin des illusions et de la mauvaise foi. Dans cet espace réduit à sa plus stricte nécessité résidait au fond toute la trivialité parfois magnifique de l’homme. La boite de conserve qui s’échappe pour dire merde à tous ceux qui vous ont pourri la vie, et ont ôté à l’art toute possibilité d’existence, puisqu’il ne peut plus avoir aucune utilité… Qui vous propose de partir, de regarder l’extérieur depuis un lieu nouveau, en profitant d’un temps incertain mais infini, tout en pensant à une consommation finalement tellement humaine…

Le moment où toute communauté de destin devient impossible, où tout groupement sédentaire semble voué à l’explosion car il n’y a plus de valeur digne d’être partagée… est le moment où il faut tirer sa révérence.
Plusieurs renoncements ou retraites sont évidemment possibles, plus ou moins mystiques ou spirituels… partir en restant connecté semblait être une bonne solution, la technologie n’avait pas tout gâché… enfin pas tout à fait.

La cellule devenait l’avenir de l’Homme, puisque seuls les derniers hommes avaient décidé de l’emprunter… il fallait s’échapper, échapper à toutes les hypocrisies et aux missions impossibles et enfin se résoudre à ne pas sauver une humanité indigne : sauver sa peau.

Elle avait soudain envie de dire tout cela à Yohan. Soudain, une transparente sérénité l’envahit, soudain les choses vont prendre place. Elle va partir, mais un autre avenir la concerne, c’est indéniable, soudain… Yohan est là, pas loin. Il la regarde, il lui sourit, comme il a su le faire auparavant. Elle marche dans les rues de la vieille capitale pourrie, et son ombre avance vers elle, pénètre en elle et la nourrit jusqu’à l’asphyxier. Peu importe le nom que l’on donnera à ces sentiments, peu importe si tout cela est vrai ou non. Il semble qu’elle y ait droit. Comme une sorte de récompense à la possibilité qu’elle donnera à certains, et qu’ils lui rendront en retour certes, de rêver encore, de rêver à autre chose qu’à l’évidence qu’aucune philosophie, qu’aucune intelligence plus jamais ne viendra contredire.


M.G

lundi, juin 04, 2007

Pour un monde meilleur ? (26)

La volonté de produire des choses en vue d’un but bien précis relevait sans doute de la même vanité que celle qui consiste à se chercher un charme dans un miroir jour après jour, et de constater que ce charme disparaît, ou est remplacé par autre chose, jusqu’à ce qu’il n’en reste rien bien sûr. Rien que de quoi susciter de la pitié ou de l’agacement ou les deux, ce qui nous pousse parfois à penser que les vieux seraient mieux sous terre qu’à nous faire chier ici avec leurs problèmes alors que nous en avons tant nous-mêmes.

Pourquoi sommes-nous dévorés par notre ego, alors même que nous croyons en avoir si peu…Quelle est cette recherche de reconnaissance partout où l’on peut la dénicher, qui se fait de plus en plus tenace, de plus en plus envahissante ? bien sûr…
Nous ne voulons pas mourir, tout simplement, ou en tout cas pas trop vite, pas avant d’avoir « accompli » certaines choses, ce qui revient à dire que plus on avance en âge, plus on ressent le besoin d’exister, suivant des formes différentes.

Bien sûr qu’elle était fière de ce projet, et qu’elle aurait aimé le voir s’étaler sur des doubles pages de revues plus ou moins confidentielles, plus ou moins prétentieuse, assez en tout cas pour conférer à ce qui y est montré un caractère d’honorabilité non discutable. Elle qui n’avait jamais eu goût ni pour la compétition, ni pour la publicité réalisait finalement qu’un tourbillon parfaitement humain, et sans doute pour cela dégradant l’y avait conduite avec une facilité désolante. Plus elle était avancée dans les années, plus elle avait voulu tout cela, à défaut d’autre chose peut-être, mais il lui fallait avoir la satisfaction de montrer, d’exposer son travail, comme si ainsi réellement il prenait vie. Ce n’était pas à l’usage qu’il acquérrait son permis d’être, non c’était à l’image. Cet espère d’ombre inutile qu’il projetait sur le monde. Au moins l’impact en était-il parfaitement anodin, enfin sur le paysage, et sur les esprits aussi sans doute, soyons raisonnables. Le métier était devenu tellement stupide, tellement impraticable au pays de l’ « exception culturelle » qu’il fallait trouver une maigre compensation à ces heures perdues à se battre contre le rien de moulins à vents qui n’existaient que par leur pouvoir de nuisance.

Elle avait produit une chose remarquable cette fois. Elle en avait la certitude profonde. Ce petit objet. Ce petit véhicule roulant ou mouvant qui se fondrait bien vite dans un paysage en décomposition tandis que ses habitants se laisseraient aller à une vie nouvelle possédait une beauté quasi-indéfinissable.
Il consacrait la fin du monde.

M.G