jeudi, juillet 05, 2007

Pour un monde meilleur (31)

Martha s’apprête elle aussi à commettre un acte significatif et irrémédiable. Les jours passent et elle est à la torture. Doit-elle ou non gâcher toutes ces années pour quelques simples moments de bonheur…, non pas de bonheur de flamboyance.
Et si elle les méritait à présent ces quelques moments de jeunesse retrouvée. Elle ne serait pas la première bien sûr. D’autres avant elle, nombreuses, ont commis cet acte de trahison. Penser à lui n’est-ce pas déjà trahir ?

Trahir…

Mais au fond n’appelle-t-on pas cela trahison lorsque l’on bafoue ce qui reste un idéal, or cela fait bien longtemps que cet idéal là est défroqué. Qu’elle a compris que ce dans quoi elle avait depuis l’enfance mis tant d’espoir n’était qu’un leurre, une approche de perfection illusoire, bien qu'éminemment indispensable par ailleurs.
Si l’Homme est une merde comme l’a toujours dit avec beaucoup de clairvoyance son père, pourquoi ne le serait-il pas aussi dans l’amour ? Alors il faut se contenter de cet équilibre précaire mais rassurant, souvent éponge contre le malheur. Un des malheurs.
L’esseulement…

Il ne mérite pas cela. Malgré tout non.

Mais Martha sait qu’elle va mourir. Peut-être pas tout de suite, mais de toute façon la fin est proche, peut-être mourra-t-elle seulement de lassitude d’ailleurs. Et elle aimerait avant ce dénouement qui au fond ne l’inquiète même pas se sentir exister encore un peu. Quelques gouttes de sueur sur sa peau, un œil humide et rieur qui lui parle et l’appelle à lui. Elle le voit, le devine, celui qui ne l’a pas appelée depuis un mois maintenant, il lui fait signe de s’approcher en lui offrant un sourire rare… Il flotte dans l’air comme une odeur de débauche naïve, délicate, et aigre bien sûr, de ces plaisirs que l’on désire parce qu’un sentiment, comme une attache nous les réclame.
Ce jeune homme a pris place en elle. Il s’y tient au chaud et attend son heure.
Elle seule peut décider d’aboutir ou non à cet instant fatidique…

Tic toc, tic toc…


M.G

mardi, juillet 03, 2007

Pour un monde meilleur ? (30)

Chaque matin c’est à présent le même rituel. Elle reste au lit et se contient en elle-même le plus longtemps possible. Patiente inlassablement en tentant de savoir si aujourd’hui encore ce sera bon…cherche à sentir, à percevoir entre le visible et l’invisible, le sensible et le désiré…
L’aube est terne, comme elle l’est toujours enfin depuis quelques temps maintenant. Une faible lueur de peu d’espoir pénètre par le store.
Hier au café à côté de la boutique ils ont annoncé aux clients médusés qu’ils ne serviraient désormais plus d’alcool.
Les voisins de palier sont partis depuis une semaine sans laisser d’adresse, sans laisser de trace.
Les derniers magazines non « officiels » arrêtent les uns après les autres d’imprimer…
Un été sombre et gris semble vouloir s’imposer comme ultime et perpétuel destin.
Pourtant Myriam espère.
L’odeur du café commence à se répandre comme chaque jour, grâce à la minuterie qui se révèle être une belle invention. Elle s’en emplit d’illusions. Imagine des couleurs douces et joyeuses, tout en nuances de ce à quoi elle n’avait plus osé espérer depuis au moins dix ans… bientôt elle entendra crier dans cet appartement. Bientôt elle aura peut-être une raison de se lever le matin… bientôt…
Le réveille bip.
Bip bip bip bip bip bip bip bipbipbipbipbipbipbipbiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiip.

Sans réfléchir elle se lève, ouvre le store et aperçoit un rayon au loin puis se dirige vers les toilettes, d’où elle revient avec un sourire béat accroché à son visage.
Elle se sert ensuite une énorme tasse de café dans laquelle elle jette deux gros sucres. Puis sort la confiture du frigo et en tartine généreusement deux grandes tranches de pain.
Elle sera grosse, et alors ?
Ils la vireront ?
Et alors.
Elle les emmerde.

Bientôt elle ira vivre à la campagne avec sa tante. Rien de précis encore, mais elle le sent, elle le sait. Bientôt ce seront les plus beaux moments de son existence.

M.G