jeudi, septembre 06, 2007

Pour un monde meilleur (34)

- Les choses, c’était vivre, bouffer de la vie, pas juste être enfermé derrière mon écran d’ordinateur… c’est bizarre non, quand on pense que souvent on a besoin d’écrire aussi pour laisser quelque chose, une trace, ça nous semble plus important, et finalement ensuite ça se retourne, on veut écrire mais on veut aussi vivre. Si ça c’est pas se sentir vieillir…


- mais enfin tu avais quel âge ?
- j’avais vingt huit ans je crois.
- Ah oui ? remarque moi aussi je me suis sentie vieillir assez jeune, mais en toute honnêteté après ce n’est pas pareil. Plus tu avances en âge plus tu as l’impression de te diluer dans l’existence, avec un grand E. tu te fonds dans la masse de tes semblables et de leur destin. Tu réalises que tu n’es pas du tout unique, tu fais de plus en plus de compromis.
- Mais qu’est-ce que tu racontes ?
Le ton est sec, violent presque. Elle se sent faible soudain, déstabilisée. Impressionnée peut-être. Oui en fait depuis le début c’est ça. Elle ravale sa salive pour lui répondre… hésite.
- euh, ben quoi. Elle tire sur la cigarette et cherche son regard, son sourire qui la réconforterait, la pousserait à croire qu’elle ne s’est pas trompée, que l’homme ici présent ce soir, face à elle, le plus jeune homme l’aime. De ce sentiment qu’elle croit connaître tout en n’y croyant pas vraiment, de ce sentiment qui pousse deux être à se faire confiance, un temps au moins.

Il ne sourit pas. Lance un regard sombre et péremptoire qu’elle soutient sans trop faiblir, enfin elle l’espère.

- comment peux-tu parler de compromis ? Tu n’as pas cédé, tu te bats, à ta manière tu agis. Alors pourquoi cette fausse modestie, je ne supporte pas qu’on ne reconnaisse pas ses actes et leur portée, surtout lorsqu’elle est positive.
- Mais toi même tu m’as reproché de ne pas me battre.
- Non ce n’était pas un reproche. Plutôt un regret confie-t-il doucement.

Il doit être tard pense-t-elle. Et après ? ensuite que va-t-il se passer ? la violence qu’elle sent en lui l’effraie un peu. Elle a connu un homme violent une fois, il y a très longtemps. Enfin les hommes sont tous plus ou moins violents… ses mains sont fines, il cache sans doute une grande sensibilité, comme un autre homme, celui avec lequel elle a fait sa vie. Elle lève ses yeux vers lui et croise un regard trouble, à la fois rieur et inquiet, qui semble l’interroger, l’appeler. Il lui sourit à présent.

- je peux te prendre une autre cigarette ? demande-t-elle très bas, et sa voix se casse. A ce moment elle se sent adulte, l’adulte, la mère. Celle qui en tous temps aurait dû savoir protéger, mais les femmes n’ont jamais le pouvoir, jamais ne le prennent.
- Bien sûr répond-il, et il lui fait un clin d’œil en ouvrant délicatement le paquet.

M.G

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